Pensées Tibétaines
Volent au vent à des milliers de faîtes et d’heures d'ici, des tissus détrempés par le souffle du temps. Ces drapeaux de prières, effilés, limés résistent sur la corde comme en apesanteur. Les "loungta" ou "chevaux de vent"sont des véritables équilibristes, funambules. Ils se jouent des fouets du vent et des morsures du givre. Fouettés, givrés, les mots sont arrachés, on les croirait perdus et pourtant ! Tout en dégringolant des sommets hypoxiques, ils sèment les prières porte-bonheurs au quatre coins de la planète. Nous réchauffant le cœur et nous oxygénant d’un courant d’air pur. L’azur a meilleure allure et la brise a sa nouvelle bise.
Nous les pauvres diables des ras des pâquerettes, restons là, face à cet aria, souvent insensibles à ce chant. Préférant ressasser les peines que de les briser. Moi je me veux Sourire au vent, Récipiendaire de l’insaisissable pensée tibétaine. Ainsi en recevant ces vérités je pourrai à mon tour me mettre face aux vents. Mes cheveux dorés, une fois libérés de la coiffe et des carcans, essaimeront de mon âme prisonnière, mes pensées les plus secrètes. Funambules ou acrobates enracinés sur ma voûte crânienne, ils onduleront une farandole ou une passacaille, indicibles ils chanteront aussi un air d’opéra.
Je laisse mes cheveux au vent.
Ainsi, comme ces mouchoirs de couleurs vives remplis de paroles et de sagesse tibétaines aux sommets les plus hauts, mes mèches souffleront toutes mes pensées secrètes, libertines et amoureuses. Laissons aller les mots où va le vent. Répandre les bonnes paroles, semer aux quatre vents son Amour et son bonheur.
Comme je suis source, je laisse mes mots à mon puisatier, et si, de ce plancher maritime le souffle en est faible, je grimperai jusqu’à ces faîtes célestes pour mieux couler vers lui dans des rafales les plus agaçantes.
Qu'importe la peine, les cailloux, le manque d’oxygène, les sentes vertigineuses, ce chemin, ce voyage je le ferai pour abreuver sa soif. Je lui appartiens comme il m’est mien.
Un vent nouveau souffle désormais dans ma chevelure. Toison des argonautes, mon trésor est répandu mais seul le puisatier en sera le maître. L’espoir d’une source se trouve dans les mains d’un puisatier et non dans celles de Pandore.
Le vent a beau souffler sur le Népal, les mots ne pallissent pas sur ces tissus tourmentés. Les chevaux de vent sèment les pensées tibétaines. Guirlandes de couleurs ils galoppent le bonheur... ils en sont leur porte parole. Faisons de même, cheveux au vent.